2014 – ALPES-MARITIMES RUNNING TOUR

Du 9 au 15 septembre 2014

475, 710 km pour 14 594 m de D+

en 5 jours 22 h 28 mn

Datcharun & Thierry Kerhornou soutiennent l’association Sourire & Partage Achetez les Kms de Thierry (1€ / km) en faveur des enfants gravement malade

 

Septembre 2007 : Thierry KERHORNOU se lance un défi un peu fou, celui de faire le contour des Alpes-Maritimes en courant et en continu sur les routes les plus proches de la limite du département. Ce challenge ne se fera pas sans embûches avec des changements de températures importantes passant de 25° sur le bord de mer au départ de Nice à -1° au départ des cols au nord du département avec de la pluie et de la neige qui l’empêcheront de réaliser complètement ce tour (fermeture des cols de La Cayolle et de La Bonette) en devant bifurquer sur Valberg à la sortie de Guillaumes. Du coup, il aura parcouru 397,9 km (avec 10 000m de dénivelé positif) en 4 jours 20h et 34mn sur les 460 km prévus au départ, ce qui reste encore aujourd’hui un record pour le contour du département.

Septembre 2014 : 7 ans après, Thierry boucle réellement ce tour en franchissant ces fameux cols de La Cayolle et de La Bonette et les 475 km de distance.

tracé du parcours avec la balise GPS ICI / le parcours sur Garmin Connect ICI

Le récit par Isabelle Chansigaud (photographe et accompagnatrice)

Depuis quelques jours, un vent d’effervescence plane au-dessus de nos têtes. Le ravitaillement est fait, le camping-car, joliment sérigraphié à l’effigie de l’Alpes-Maritimes Running Tour, de Datcharun et des sponsors, est fin prêt. Dernières mises au point et rangements dans le petit habitacle qui va devenir notre quartier général durant tout le parcours. J’appréhende un peu la conduite de cette grosse bébête à moteur, tellement plus volumineuse que ma modeste 107, mais l’avenir démontrera que je m’y suis plutôt bien adaptée, d’autant que la conduite urbaine et périurbaine n’est pas mon fort, mais que la conduite en montagne, j’adore.

L’équipe se met en place autour de l’homme au grand cœur, les accompagnant(e)s aussi, ainsi que la presse et les officiels (pardon de ne pas citer tous ceux et celles qui étaient présents au départ, mais je ne voudrais surtout froisser personne en cas d’omission). Même les poissons volants jouent en préambule leur ballet d’exocets au-dessus de la mer. Top départ vers l’ouest. Jean-Pierre au volant, Maïe et moi en mode photos-vidéos prenons le rythme qui ne nous quittera plus jusqu’à la fin, films-photos / photos-films. Nous adoptons la cadence de micro-sauts de puces de quelques kilomètres, ce qui nous permettra tout au long du parcours de retrouver notre coureur et son escorte.

Passé le départ, à Cagnes-sur-Mer l’entourage de Thierry s’est un peu réduit, je ne revois pas vraiment Gil, ni Sophie qui nous quitte très provisoirement, mais un troisième photographe est là, presque par hasard et par surprise, il ne sait pas encore tous les kilomètres qu’il va parcourir, n’est-ce-pas Bruno ? Pour le moment Jean-Pascal est en binôme, il a prévu de faire une bonne partie du littoral ce jour, le tout étant de ne pas manquer une gare pour éviter les faux-départs.

Au Fort Carré, Lise vient faire un bout de chemin avec Thierry et Jean-Pascal, tandis que Jean-Pierre me dépose à l’entrée du Vieil-Antibes pour prendre quelques clichés sur les remparts. Il fait chaud, très chaud, et le soleil qui tape à l’heure méridienne fait souffrir les coureurs, que je ne parviens pourtant pas à suivre pour les photographier de dos un peu plus longtemps, car ils vont trop vite pour moi. En plus je suis une catastrophe ambulante, tellement concentrée sur mes modestes missions que j’en ai même mis mon débardeur à l’envers (merci Jean-Pascal de me l’avoir signalé plus tard au Palm Beach) et que je cherche désespérément Bruno qui est …. Devant moi lol.

Au Cap d’Antibes, je prends le temps de profiter du paysage et des bateaux du port de l’Olivette en attendant Thierry et ses compagnons de route. Ils filent à présent sur Juan-Les-Pins, où Lise nous quitte, très vite remplacée par Richard que je vois arriver à Golfe-Juan au niveau de Michel, mon plagiste de Golfe-Plage. Jean-Pascal « rate » la gare de Golfe-Juan que je lui avais suggérée pour jouer un peu les prolongations, et se retrouve à Cannes 😉 A partir de là, la police nous escorte chaleureusement jusqu’à Mandelieu. Gregory Berben nous attend, accompagné de Cali, sagement installée sur le scooter, trop mignonne, tandis que j’expérimente mon premier massage des jambes en or de notre coureur préféré (bon j’ai des progrès à faire, mais il me coach).

Les kit-surfeurs s’en donnent à cœur joie dans le vent, et je profite d’une courte pause pour piquer une tête, histoire de me rafraîchir un peu et de dire bonjour aux poissons. Désormais notre champion va courir seul un long moment, et  au rythme de ses foulées nous quittons le littoral sous une chaleur écrasante, pour trouver un peu d’air sur les hauteurs en gagnant Tanneron. Personnellement je ne connaissais pas cette partie du département, que j’ai découverte avec plaisir. Jean-Pierre à la barre nous dépose de point en point pour ravitailler Thierry et faire des photos, jusqu’à la fontaine de Tanneron, sur fond de coucher de soleil orangé, salvatrice après cette journée torride.

Difficile de prendre des photos de nuit de qualité, mais l’atmosphère magique de la nature, dans une nuit de pleine lune qui joue avec quelques nuages baladeurs, vaut bien tous les clichés du monde, il suffit de se laisser porter par les bruits de la forêt et par l’imagination pour l’apprécier pleinement. Prochaine étape à rallier : St Vallier de Thiey, par Spéracedes, Le Tignet et St Cézaire-sur-Siagne. Aussitôt dit, aussitôt fait, et à St Vallier j’ai un plan p’tit déj où je m’arrête parfois au cours de mes randos, qui permet à tous de faire un petit break. Dommage que Guignol ait remballé son matériel sur le grand pré, n’est-ce-pas Maïe ? Reste à reprendre la route avec le journaliste qui doit filmer Thierry et interviewer Maïe.

Le Haut-Pays Grassois nous dévoile ses paysages tour à tour karstiques et verdoyants, nous basculons de l’autre côté du col de la Faye vers Nans et Escragnolles, où les ânes ne sont pas au rendez-vous. Le temps se gâte et la pluie arrive, et après une étape à la Source Parfumée et ses alambics où nous ne boirons pas d’hydromel. Thierry et Jean-Pierre revêtent leurs ponchos, pour repartir en binôme vers le col de Valferrière en ayant la surprise de la visite amicale d’Abdel sur leur route. La pluie se calme, et à Séranon, la lumière est envoûtante et magnifique, l’orage gronde non loin, une atmosphère dorée s’empare des arbres et des champs de colchiques, sur fond de ciel anthracite constellé d’éclairs. C’est sans encombre que le Logis du Pin s’endort dans une lumière orangée mêlée de nuages à notre arrivée. Un peu de sommeil fractionné (quand Thierry dort, je dors, je me cale sur ses pauses au maximum pour rester la plus opérationnelle possible), et permettre à mes coéquipiers qui ont davantage conduit que moi depuis le départ de récupérer un peu aussi. Et à certains de tester les trucs qui puent dans le frigo, genre saucisson à l’ail et camembert, je comprends pourquoi aucune mouche n’est entrée dans le camping-car, et dire qu’il a fallu que je note son alimentation pendant tout le parcours (j’en ai fait des ratures, des colonnes et des bâtons, sans pour autant être certaine que la liste soit vraiment exhaustive mdr !!)…. Je précise quand même que je n’ai refusé qu’une seule chose en 6 jours, c’est toucher à ces deux aliments naméo……..

En pleine nuit, Thierry gagne la Foux, puis la magique Clue de Saint Auban. Je commence à pester contre mon appareil photos qui ne veut pas fixer ses foulées et me floute la majeure partie de mes photos en mouvement grrrrrr, réussis à sauver quelques paysages et à maîtriser  tant bien que mal quelques vidéos, ouf !! Je n’imaginais pas être dans cette clue à une heure aussi tardive, je dois avouer que toutes ces nuits d’attente dans l’obscurité n’ont été que du bonheur pour moi, à écouter les bruits de la nature, à tenter d’identifier beaucoup de présences animales sans pour autant toujours y parvenir, à croiser une biche avec Jean-Pierre, à entendre des sangliers que Thierry a vus, à écouter le hululement des chouettes, que d’apaisement de se laisser ainsi porter par la nuit, même si j’ai eu du mal à convaincre Maïe d’adhérer à mon sentiment (il faut dire qu’un drôle de grizzli bleu à frontale lui a fait une peur de la même couleur dans la nuit). La pluie s’est transformée en brouillard, rendant l’atmosphère encore plus intime et ouatée, j’adore, sauf pour les photos parce que là ça devient vraiment mission quasi impossible !!

A Briançonnet, il fait encore presque nuit, l’aube dans la brume peine à dissiper les nuages, et il faudra attendre Collongues pour voir apparaître les premiers rayons du soleil. C’est là que je chausse enfin mes baskets jusqu’à La Penne, sur une belle route en pleine forêt. Mes pas résonnent de concert avec ceux de Titi, rythmant naturellement la mélodie de notre progression. C’est le monde à l’envers, c’est lui qui m’encourage malgré tous les kilomètres qu’il affiche déjà au compteur, extraordinaire volonté et gentillesse. Au petit matin, nous voyons venir à notre rencontre Le Chien, un adorable quatre pattes arborant un collier couleur Team Datcharun, qui nous a accompagnés durant 7 kms de ses papattes et de sa gentillesse, et qui a immédiatement adopté Titi, lui obéissant au doigt et à l’œil, histoire de devenir notre mascotte du jour. Nous commençons à nous inquiéter pour lui, d’autant que d’après son collier il vient quand même de Gars, ce qui n’est pas tout près, mais pas d’interlocuteur au numéro porté sur son collier. A un moment donné, il réagit instinctivement au bruit des cloches d’un troupeau. Finalement nous apercevons deux chiens qui lui ressemblent comme des frères, et le berger hélé difficilement finit pas nous répondre évasivement sans se déranger le moins du monde que c’est bien son chien, ouf quand même, il a retrouvé ses bases. Il serait bien resté avec nous je crois il a quand même fait au moins 14 kms aller-retour, de son troupeau à nous et inversement, tout en douceur et gentillesse.

A l’approche de La Penne le paysage, typique de l’arrière-pays grassois, est parsemé de gorges et clues, après celle de St Auban, celle du Riolan, et le pont des Miolans. Il fait à présent un temps idéal pour courir, et Thierry reprend son rythme avec Jean-Pierre, via le Col Saint-Raphaël et Puget-Théniers, puis Entrevaux par la dangereuse nationale qui longe la voie ferrée. La citadelle se dessine dans le soleil couchant, heureux présage de l’entrée dans les gorges de Daluis. Peu avant nous rencontrons un couple fort sympathique, la dame nous déclare que son époux a quitté son canapé en nous apercevant, pour saluer « le monsieur qui court et passe à la télé ».

Nous retrouvons le calme sur cette route des Hautes-Alpes, où la lune nous offre un spectacle saisissant en surgissant derrière la montagne dans les roches rouges, comme venue de nulle part pour entrer dans la lumière de la course ascendante de Thierry.  A Daluis c’est le désert, nous nous arrêterons à Guillaumes faire le plein d’eau potable et grignoter un peu (mince, on a dû acheter une saucisse à l’ail magique pour les uns, car elle n’en finit pas, mais diabolique pour les autres !! – le camembert a quant à lui enfin trouvé une bonne âme pour l’enfermer dans une boîte, c’est déjà ça !!). La sylphide statue de la place de la Mairie de Guillaumes semble frissonner dans sa nudité vespérale, ce qui inquiète d’ailleurs Jean-Pierre 😉

Le Val d’Entraunes, cette haute vallée du fleuve Var (qui a donné son nom au département voisin, mais coule dans les Alpes-Maritimes, et dont la source jaillit à Estenc, hameau de la commune d’Entraunes), est aussi un havre de paix, loin de toute urbanisation. Sur ce territoire verdoyant et sauvage, les villages que nous avons traversés ne sont qu’authenticité et invitation à un retour à la nature. C’est là aussi que l’itinéraire de Thierry va trouver sa vraie dimension, celle qu’il n’a pas pu accomplir il y a sept ans dans la totalité du parcours qu’il s’est fixé. Cette année, les conditions météo sont bonnes, et les cols de la Cayolle et de la Bonette ouverts et sans intempéries. C’est ce qui va changer le timing initialement prévu aussi, car franchir ces deux cols n’est pas une mince affaire, et n’a rien à voir avec la bifurcation de Guillaumes sur Valberg qui lui avait été imposée quelques années auparavant. Il va alors nous donner une énième leçon de courage, sans jamais renoncer, allant au bout de lui-même avec une abnégation sans faille, nonobstant les bien légitimes moments de fatigue qu’il surmonte avec force.

Les passages en haute montagne représentent sans doute mes meilleurs souvenirs de ce périple, d’autant que la météo nous a été plus que favorable durant ces deux journées d’altitude. A Villeneuve d’Entraunes nous avons reçu un accueil très sympathique et chaleureux au petit jour, le Relais des Cavaliers nous offrant un café fort bienvenu, après que l’œil avisé de Thierry m’ait fait observer des dizaines d’adorables petits lapins de garenne bondissant dans l’herbe. Puis toujours plus haut, accompagné par Bruno, Jean-Pascal et Jean-Pierre, qui nous ont rejoints (le temps de se changer, ils en mettent du temps alors, ils ont pensé au p’tit déj merci encore pour tout) notre champion poursuit avec eux la route du col de la Cayolle. Nous libérons aussi Jean-Pierre pour qu’il puisse courir, et je prends le volant du camping-car pour 24h (bon les rochers et les a-pics vertigineux ça ne me dérange pas, mais ne me demandez pas de faire des manœuvres pour me garer hein 😉 ), et Maïe celui de la voiture de Jean-Pascal, afin que nos 4 chevaliers oranges de la montagne puissent chevaucher de concert. Sur cette route qui semble mener au bout du monde, après les derniers villages de St Martin d’Entraunes, Entraunes et Estenc, un sentiment de parfaite osmose avec la montagne m’a doucement envahie. Je ne connaissais pas ce col, le découvrir au rythme des foulées des coureurs m’a permis d’en profiter au maximum.

Ce ne serait rien de dire que la montée au Col de la Cayolle est belle, elle est grandiose et magnifique, éclatante de splendeur. Nous en avons plein les yeux, la montée en altitude ne fait qu’accentuer la beauté des paysages. Nous arrivons au sommet aux alentours de midi, ce qui nous permet de faire une pause-sandwiches-cafés dans l’herbe (heu au fait elle est où Maïe ? il ne faudrait pas l’oublier dans l’herbe 😉 ), avant de basculer sur l’autre versant de la montagne, en direction de la vallée de l’Ubaye. Sans doute ankylosés par le manque d’exercice ;-), nos quatre larrons s’envolent à travers la montagne pour un mini-trail improvisé, ah ben oui alors, il faut un peu d’exercice dans une journée mdr !! Pendant ce temps-là, Maïe et moi restons un moment bloquées au milieu d’un important troupeau de moutons, nous laissant largement le temps de les prendre en photos et de les filmer.

A Bayasse, véhicules et coureurs doivent se séparer, Thierry et ses valeureux chevaliers partant à la conquête de la piste qui rejoint le Col de la Cayolle au Col de la Bonette, tandis que nos véhicules doivent pour les rejoindre effectuer un détour d’une cinquantaine de kilomètre via la vallée de l’Ubaye, Uvernet, Barcelonette et Jausiers. Oups c’est étroit ces rochers, mais ça passe avec le camping-car, au millimètre parfois me dira plus tard Maïe qui me suit en voiture, moi qui ne me sentais pas de le conduire ce camping-car, voilà que je l’adopte à présent !! Et je vous le donne en mille, devinez de nous tous qui arriva en premier ? Nos coureurs bien sûr, que nous retrouvons un brin congelés par 4° au point de ralliement, environ 2 kms sous le col de la Bonette.

Réconfortés et réchauffés (j’essaie d’avoir toujours mes deux thermos pleins prêts à servir 😉 ), nos comparses s’équipent en vue de contourner le sommet et de redescendre. Je sais maintenant pourquoi certain(e)s voient des extra-terrestres dans les montagnes la nuit, parce qu’ils nous ont trop fait rire déguisés en cosmonautes oranges et bleus équipés de frontales, quelle rigolade dans le camping-car. Bon, ce n’est pas tout ça, il va falloir nous le grimper ce sommet sous des myriades d’étoiles dans la voie lactée. Il n’y a pas grand monde tout en haut de la Bonette aux environs de minuit, à part un couple d’amoureux et un véhicule dont le jeune chauffeur s’inquiète gentiment de notre présence. La nuit s’écoule magnifique, je suis très loin dans mes pensées, et c’est totalement séduite et envoûtée par cette mer de nuages éclairée par la lune dans l’immensité, sous les étoiles filantes (j’ai fait immédiatement un vœu 😉 ) que j’aperçois enfin trois petites loupiotes descendantes et dansantes. J’ai beau leur demander d’éteindre leurs frontales pour les photos, ils ne m’écoutent qu’au dernier moment grrrr, ah ces mecs alors 😉 si on m’avait dit que je serais en ces lieux en pleine nuit à les attendre, je ne l’aurais même pas imaginé en rêve !!

L’équipe décide d’un arrêt improvisé et bienvenu dans les ruines du Camp des Fourches, pour un peu de sommeil réparateur, tout en inventant l’extension du camping-car 4 places à 6 places, mais ça marche, on y tient, pas de souci, il suffit de ne pas trop bouger une fois installés 😉 Les seules habitantes des lieux sont de petites chauves-souris, qui m’ont tenu compagnie en attendant les coureurs, tandis que le côté un peu fantomatique des ruines dans la nuit de pleine lune suscitait en moi des rêves éveillés  !! Une autre dimension, un autre monde, c’est ce que j’ai ressenti en attendant les coureurs, une impression mêlée de solitude et de plénitude, que j’ai du mal à définir, mais j’écoutais le silence dans l’immensité et c’était tellement bon 🙂

Après ce court repos nocturne, Thierry et ses trois compères amorcent la descente sur Bousiéyas. Tandis que je refais le plein d’eau potable, Bruno sympathise avec un joli petit minou câlin (aux pattes de velours dont les coussinets sont certes moins fatigués que ceux des pieds de Titi) visiblement heureux de trouver des compagnons de jeux nocturnes, et qui tenterait bien une incursion dans notre roulotte. A l’approche du Pra et du pont sur le Salso Moreno, les premières lueurs de l’aube apparaissent tout doucement. Jean-Pascal a relayé Maïe au volant de sa voiture, tandis que Jean-Pierre arrive tout fringant mais seul au Pont-Haut de la Tinée, sans doute perdu dans ses pensées a-t-il un peu « oublié » Titi et Bruno qui ne vont pas tarder.

Le jour s’est levé pendant la descente sur St Etienne de Tinée, où nous ont rejoints Sophie et Pierre, petit-déj bienvenu en mains merci 🙂  tandis que Bruno et Jean Pascal vont ressourcer un peu leurs mollets mis à mal par tous les faux-plats montants des dernières 24h 😉 Et c’est reparti pour Thierry et Sophie qui s’élancent sur la piste cyclable qui longe la Tinée, jusqu’à l’embranchement de St Sauveur, tandis que Jean-Pierre prendra le relais à l’amorce du Valdeblore, jusqu’à La Colmiane. Notre champion, un tantinet fourbu mais vaillant, donne le tempo, et à Isola nous allons rapidement faire la bise à Gisèle, la patronne du Collet, pour un « Titi-tartare express » ;-), avant de continuer à perdre de l’altitude jusqu’à l’embranchement de St Sauveur sur Tinée, où Thierry va remonter le Valdeblore au crépuscule, puis dans la nuit, jusqu’à La Colmiane.

Après la descente de La Colmiane en nocturne, Thierry rejoint La Bollène, non sans un clin d’œil à la bâtisse qui nous avait tant amusés durant le Fibrothon : « Mieux vaut boire ici qu’en face » ;-), puis prenant la direction de Turini, avec Jean-Pierre et Michel. A l’aire Sainte-Elisabeth, une équipe de jeunes adeptes de Canyoning applaudit et encourage gentiment Thierry.

Au Col de Turini nous rejoignent Jean-Pascal, bien remis de ses grimpettes de la veille, ainsi que Sophie et Pierre, les bras toujours chargés de cadeaux, café, pain frais et fromage de Sospel mmmmm 🙂 Au Col de Turini, une adorable chèvre câline à souhait tente une incursion dans le camping-car, aussitôt revêtue par une âme coquine d’un tee-shirt de la Team, qu’elle porte à merveille sur sa robe noire, très fière avec ses jolies cornes-lyres, il faut dire qu’elle sait y faire, car sa beauté et sa douceur lui ont quand même valu un bisou du champion sur le museau à la belle 🙂 comme quoi ça valait le coup d’être moins sauvage que ses copines, et dans le même ordre d’idées, le petit fromage de chèvre de Sophie et Pierre était un régal 😉

Après cet intermède, c’est en trio reboosté que Thierry, Jean-Pascal et Sophie vont gagner Moulinet, puis Sospel. A Moulinet, je sympathise avec un couple de chevaux magnifiques, et j’en profite pour leur donner un peu de pain avec des câlins, la jument blanche est adorable et le mâle, un beau bai brun au port altier, plus ombrageux. On a du mal à suivre Célian, qui est arrivé tout droit de son triathlon dans sa tri-fonctions Datcharun, bon pied bon œil, et qui alterne vélo, course à pieds et voiture !! C’est là aussi que je m’auto-décerne l’oscar du stationnement, juste devant un beau panneau de stationnement interdit, bien vu, assumé, ben oui quoi c’était le seul endroit où me poser 😉 Dans la dernière ligne droite avant Sospel, là où la route surplombe la voie ferrée, nous avons rendez-vous avec les parents et amis de Sophie.

Arrivés à Sospel, nous retrouvons Jean-Pierre, « disparu » depuis le col de Turini, qui nous avait juste « oubliées » avec notre camping-car Maïe et moi, ne réalisant pas qu’il était parti avant nous et nous ayant cherchées, se demandant pourquoi il ne nous avait pas doublées, avant de comprendre sa méprise 😉 A Sospel c’est la fête au village, adorables petits ânes et vaches défilent dans une ambiance champêtre. Interview de notre champion, et petite pause amicale, Thierry Imbert se joignant à nous. Tandis que les parapentes évoluent gracieusement dans le ciel, et que Célian se prend pour le penseur de Rodin. Il est temps pour Titi d’aller affronter son dernier faux-plat montant, le col de Castillon. Quand je pense au nombre de kilomètres parcourus dans un dénivelé gigantesque, je me dis avec le recul combien repartir après chaque pause a dû vraiment lui demander une volonté de fer. Je suis en totale admiration devant une telle force de caractère, toujours aimable et gentil avec ses accompagnateurs, gérant même nos émotions au-delà des siennes, et comprenant nos coups de fatigue et nos états d’âme avec beaucoup de psychologie.

Au Col de Castillon, il y a de l’eau dans le gaz au sens propre du terme, quelqu’un a dû involontairement ouvrir le robinet de l’évier du camping-car, qui a noyé un brûleur et déclenché l’arrêt du gaz par sécurité !! Rien de grave, une fois diagnostiquée l’origine de l’écoulement d’eau, tout rentre dans l’ordre…. Sauf mon jean que je déchire en enjambant une glissière de sécurité pour être en surplomb pour les photos !! Thierry arrive, précédé d’un flot de voitures qui ont été gentiment canalisées par les gendarmes, dans un tunnel normalement interdit aux piétons, mais pas aux champions.

Nous arrivons sur les hauteurs de Menton, et je dois avouer que le choc de la civilisation urbaine m’étreint douloureusement. Nous sommes arrêtés dans un virage glauque après la sortie de l’autoroute, c’est moche, ça pue, où sont nos beaux paysages et nos belles montagnes ? Quelle est cette moiteur lourde qui a supplanté l’air frais et vivifiant que nous avons quitté ? ….  Heureusement que Bruno et Karen arrivent, conduits par Stéphane avec qui nous avons le plaisir de faire connaissance, sympa ton petit frère Karen, ma p’tite pile Duracell préférée est en pleine forme pour apporter sa fraîcheur bondissante aux troupes 😉

Nous traversons Menton pour nous garer au rond-point Monleon, à la limite de Roquebrune, d’où repart Thierry avec Bruno et Karen, loin de se douter qu’un nouvel épisode nous attendait : la panne de camping-car !! Voilà que le bougre refuse obstinément de démarrer, tous les voyants défilent, et je teste la batterie pour me rendre compte qu’elle est … totalement à plat, vraisemblablement à cause de nos supports multi-charges d’appareils photos et téléphones. La plupart de nos accompagnants nous ayant quittés, c’est Bruno qui fait demi-tour et revient gentiment nous assister Maïe et moi, tandis que Karen avance avec Thierry. Pas de pinces batterie dans le camping car, alors étape n° 1 : héler les voitures qui passent et le leur demander (oups à 1h du matin ça fait bizarre, surtout qu’un max d’étrangers ne comprennent rien à notre souci et que nous manquons de créer un accident). Etape n° 2 : appeler la police, qui nous donne les coordonnées du commissariat de Menton, dont une patrouille viendra très gentiment essayer de nous dépanner avec une batterie hélas trop faible. Etape n°3 : sur les conseils des policiers, appeler l’assistance et un dépanneur, qui viendra assez rapidement avec un matériel plus puissant ouf du  premier coup ça repart !!

Quid de notre champion, lâché dans la nature avec Karen, sans vivre ni couvert, ni batterie de tél !! Heureusement il a résisté, même si cet épisode a bien failli le contraindre à faire demi-tour. Grâce à Karen qui l’a bien cocooné 😉 et à Bruno qui nous a bien cocoonées aussi 😉 la petite équipe se calme et s’apaise, réconfortée et à nouveau réconfortante. Ne pas couper le moteur surtout !!

Les derniers kilomètres seront une ultime épreuve extrêmement difficile à surmonter, mais Thierry ne lâche jamais le morceau, on ne sait plus quoi inventer pour lui faire plaisir, la fatigue gagne les troupes, boissons fraîches, boissons chaudes, massages, fractions de sommeil …. C’est à la Petite-Afrique que Bruno et Karen trouveront le réconfort pour lui : il est environ 5h du mat, et un kiosque est ouvert, proposant le cheese-burger de ses rêves, et je crois bien que c’est la meilleure réanimation qui pouvait lui arriver, tellement il en avait envie, en lui rendant son beau sourire 😉 Sophie ne dort toujours pas et est arrivée à la rescousse avec son sourire chaleureux depuis Cap d’Ail .

C’est ainsi que la fin du voyage approche, dans le dépassement de soi et le courage extraordinaire dont a fait preuve Thierry. Beaucoup d’émotion pour cette fin de périple soutenue par Bruno, Karen et Sophie. Je voudrais dire et redire en boucle un immense bravo à toi Titi, et un très grand merci de nous avoir permis, à tes côtés, de réaliser ton rêve avec toi 🙂

Tandis que Bruno remballe son « cônophone », et regarde avec Karen vers d’autres horizons … la Cônombie peut-être ? 😉  d’un air de dire : « c’est fini ? », les larmes m’étreignent, de soulagement et d’émotion cette fois-ci. Je suis fière, extrêmement heureuse que Titi soit allé au bout du chemin qu’il s’était fixé, sans jamais démériter, et qu’il puisse enfin se poser un peu.

Dans le petit matin gris, un grand champion nous sourit, il est notre rayon de soleil.

Vous pouvez découvrir le parcours et son dénivelé sur www.openrunner.com/?id=3800848